C’est plus simple à dire qu’à faire ! Qui un jour n’a pas reçu en pleine figure des mauvaises paroles ou été victime d’actes tordus ? Après cela, faut-il prendre le violent entre 4
yeux et s’expliquer ? Quelquefois, il le faut, car c’est une exigence de la situation. D’autres fois, cela fera plus de mal que de bien.
Responsables
Mais ici, au-delà du cas par cas, l’importance du texte, c’est l’enjeu de cette prise à parti vigoureuse du pécheur sur trois temps (seul à seul, à quelques uns et avec la communauté): d’abord nommer le péché, ne pas l’excuser ni le minimiser, car il est destructeur, capable de faire mourir (relationnellement ou physiquement). Ensuite, dire que le péché contre le frère est intolérable et qu’il ne doit pas exister et doit donc être banni de la vie communautaire ! La troisième, nous sommes responsables si nous ne luttons pas (si je dis au méchant : ‘tu vas mourir’ et que tu ne l’avertisses pas… Ez 33, 8) d’où l’importance d’avoir du courage pour se décider à ‘traiter le mal’.
Réagir et se lever
En ce sens, le texte nous met en tension : ne pas fuir la banalisation du mal, y compris des petites violences entre personnes, mais réagir et se lever… Jésus est vigoureux contre les juifs qui veulent condamner la femme adultère (où est votre miséricorde ?), Jésus n’a pas peur de dire aux pharisiens leur hypocrisie (sépulcres blanchis !), il reproche aux juifs la violence qu’ils veulent lui faire (‘pour quelle œuvre voulez-vous me tuer…’ Jean 10, 32). Il y a chez Jésus et les apôtres une lucidité et une horreur du péché contre les personnes : « Qui hait son frère est un meurtrier, et vous savez, aucun meurtrier n’a la vie éternelle demeurant en lui » (1 Jn 3, 15) dit Jean méditant les paroles de son Maître.
Pourquoi cette hauteur de vue et cette exigence dans la vie fraternelle ? A cause de la sainteté qui doit habiter les membres de la communauté : « Recherchez la paix avec tous et la sanctification, sans laquelle personne ne verra le Seigneur (Hébreux 12, 14). Il faut avoir du courage pour expurger le péché (qui empoisonne tout) dans nos relations et dans notre vie communautaire. D’où l’importance d’être à plusieurs : « S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Eglise » (verset 17). Pourquoi ? Parce l’Eglise est le lieu de l’authenticité de l’Evangile. Rude exigence pour nous ! Mais n’est-ce pas du témoignage de sainteté pour le monde dont il s’agit ?
P. Jean Michel Moysan, curé