La mort de Jésus sur la croix avait été un échec du point de vue humain. Ils sont donc tristes, ces ‘pèlerins d’Emmaüs’ qui s’éloignent de Jérusalem, comme on s’éloigne d’un feu qui ne brûle plus !
« ne fallait-il pas… »
Jésus les écoute dans leur version des évènements. Et il reprend la parole : ‘et partant de Moïse et des prophètes…’ il fait une longue ‘exégèse’ (que nous n’avons pas !) qui se termine par cette phrase énigmatique qu’il nous faut pénétrer : « ne fallait-il pas… » la souffrance est-elle nécessaire pour la vie chrétienne ? Pourquoi ‘fallait-il’ que la résurrection (la gloire) passe par la souffrance ? Quelle religion doloriste, diront certains ! De plus, cette souffrance était-elle inscrite dans la pensée du Dieu pour son Fils ? Quel Dieu, ce Dieu chrétien !
La clé est dans l’expérience suivante : un homme, après une période d’épreuve (chômage, maladie) peut dire : j’en ressors mûri, plus adulte, plus compatissant envers les autres… la souffrance m’a laminé, mais elle m’a purifié, libéré de mon égo… ne fallait-il pas cette souffrance ?’ Mais non, dira un autre, pourquoi faut-il la souffrance pour mûrir ? On peut très bien mûrir sans la souffrance’... ce n’est pas sûr, rétorquerait le premier ! C’est le passage par cette souffrance qui m’a rapproché de moi-même et de Dieu ! Elle a été nécessaire pour moi !
c’est ‘en Lui’ que nous pouvons tout supporter
Et pour Jésus ?… Il se manifeste comme Messie en traversant tout ce qu’un homme peut souffrir (haine, solitude, fautes des hommes, croix diverses)… mais en la traversant « dans l’amour pour Dieu le Père »… et là, ça change tout ! Dans notre vie quotidienne, c’est ‘en Lui’ que nous pouvons tout supporter, car il est le ‘premier de cordée’ ! « Ce sont nos souffrances qu'il a portées, c'est de nos douleurs qu'il s'est chargé; Et nous l'avons considéré comme puni, frappé de Dieu, et humilié.…» (Isaïe 53, 4) Par là, il nous en sauve !
Il fallait bien qu’il traverse cela ‘pour nous’ ! C’était la volonté du Père. « Puis, s'étant mis à genoux, Jésus pria, disant: Père, si tu voulais éloigner de moi cette coupe! Toutefois, que ma volonté ne se fasse pas, mais la tienne…» (Luc 22, 41) La volonté du Père est salut, pas mise à mort !
Comme lorsqu’un couple souffre pour ses enfants adolescents, il sait qu’il lui faut traverser ces crises ‘pour eux’ et tenir bon ! Il ne peut pas y couper ! Notre vie devient adulte dans la foi en consentant à entrer dans la souffrance des moindres détails pour devenir libre, mais n’oublions pas de la vivre dans le Christ amour, car sans amour, la souffrance nous tue à petit feu !
Non, la croix du Christ n’est pas un échec humain, mais le lieu du Salut divin par l’amour livré !
P. Jean Michel Moysan, curé